DOSSIERS TECHNIQUES
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Ceinture Noire - trois points importants

Ceinture Noire - une fin en soi ou le début de tout ?


La Ceinture Noire, objet de toutes les convoitises et symbole mystique des pratiquants débutants, n'est en fait que le tout début, avec le "Shodan" (1er Dan) de l'apprentissage proprement dit. Ceci peut paraître paradoxal mais, lorsqu'on arrive à ce stade, et même au-dessus (2ème voire 3ème Dan), on réalise mieux ce que ceci a de vrai. Et, de même que l'on inculque inlassablement les "bases" aux débutants, il s'agit, arrivé au Shodan, de pouvoir engager une nouvelle ère de pratique sur des bases tout aussi bonnes.

Repérer l'essentiel

Les programmes d'accession à la Ceinture Noire, quel que soit d'ailleurs le style, indiquent clairement la liste de ce qu'il faut présenter, les techniques de Kihon, les Kata et les formes de Kumité demandées. Il y a certes beaucoup de choses à connaître, ce qui est somme toute normal. Mais certaines de ces choses sont particulièrement importantes car elles conditionnent la majorité des autres et constituent à leur tour les véritables bases d'une progression ultérieure. Ceux qui pratiquent avec assiduité les Kata sont mieux à même de saisir le sens de ces principes. Et en l'occurence, la forme "traditionnelle" du Shotokan les exprime on ne peut plus clairement.

Le regard est l'expression du mental

Toute expression technique ou gestuelle, pour demeurer dans l'esprit de l'Art Martial qu'est le Karaté, doit obligatoirement être accompagnée, ou, plus précisément encore, précédée de deux choses. L'une est la respiration, l'autre le regard. Ce dernier doit non seulement exprimer la détermination, la concentration, le mental, mais il doit pouvoir être "projeté" en avant vers la cible, qu'il doit en quelque sorte "traverser", avant que la technique ne vienne à son tour traverser cet objectif. Comme s'il avait le rôle de frayer d'abord le chemin, le geste n'ayant plus qu'un rôle passif, littéralement aspiré vers le but désigné.

Outre ceci, il est évident que la visualisation d'adversaires potentiels impose que l'on quitte jamais ceux-ci des yeux, et qu'il est aberrant d'exécuter des enchaînements de Kihon ou de Kata, voire de Kumité éducatif, les yeux baissés, dans le vide ou arrivant après l'exécution de la technique.

Tout sur la jambe arrière

La notion de "poids", telle qu'on l'explique aux débutants, est principalement "statique". Par exemple, on dira qu'en "Zen Kutsu" le poids est sur la jambe avant (au moins à 70-80%), sur la jambe arrière en "Ko Kutsu", à 50-50 en "Kiba Dachi", etc. Ceci est vrai si on prend la posture établie et maintenue, en dehors de toute considération d'impact. Cette vision des choses fait que, lors des déplacements par exemple, le talon se soulève, et à l'arrivée, la sensation reste sur la pointe des pieds, le buste part en avant, les connexions se perdent, bref, l'efficacité est proche de zéro au moment du "Kime" !

Le point important est qu'il faut au contraire maintenir la sensation sur la plante, voire le talon du pied arrière, pour renforcer la chaîne sol - jambe arrière- hanches (hara) - point d'impact. C'est pourquoi on dit que, même en Zen Kutsu (!), le poids est intégralement sur la jambe arrière. Même si ce n'est que le très bref instant du Kime, c'est essentiel pour que tout fonctionne. Et de plus, cette recherche de sensation évite de trop avancer le pied avant, empêchant d'enchaîner d'autres déplacements rapidement, en restant "plombé" sur sa jambe avant, à la merci du contre adverse éventuel. Et la proposition est encore (et particulièrement) vraie en Kiba Dachi, où l'une des deux jambes est en général "arrière", ce que l'on peut travailler utilement dans les Kata "Tekki" ou dans les Gyaku Tsuki Sokumen du Kata "Gankaku".

Last but not least - Hikité

Beaucoup d'idées fausses circulent sur le fait de tirer un bras vers l'arrière, comme on dit - en "Hikité". Ne parlons pas de ceux qui pensent juste "ranger" leur bras inutile plutôt que de le laisser pendre. Il y a ceux, qui constituent d'ailleurs la majorité, qui pensent ainsi accentuer l'efficacité d'une technique de bras par une rotation accrue de la hanche. Ceci n'est pas complètement dénué de sens, mais malgré tout, le fait de tirer quelque chose vers l'arrière va à l'encontre de l'idée d'aller au contraire vers l'avant, même si la hanche tourne, etc.

La réalité est tout autre, mais en fait très simple. Le Hikité permet de connecter le côté du corps qui n'est pas celui où se produit l'impact, tout en renforçant l'action par un travail symétrique, lequel est dirigé vers l'avant. Tout le secret réside dans la sensation développée par le poignet posé sur l'os iliaque, l'épaule basse, arrondie et, de ce fait, poussée vers l'avant.

Simple a priori, et pourtant ...

Ces trois points paraissent anodins, et pourtant ils sont difficiles à maîtriser. D'abord parce qu'on n'y pense pas, se concentrant plutôt sur ce qu'on croit être l'essentiel. De plus, il est encore plus difficile de les faire coexister en même temps en permanence. Et pourtant, c'est bien là que réside un des secrets fondamentaux de la maîtrise technique. C'est pourquoi, en Shotokan traditionnel, le premier examen de Ceinture Noire est destiné à valider ces bases particulières, considérant qu'elles seules permettront une progression utile de la pratique par la suite. Bien sûr, le contenu technique doit être présenté correctement, mais ces points particuliers sont ceux auxquels le jury accorde le plus d'attention.

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