DOSSIERS TECHNIQUES
Rubriques   21
Le respect

Les temps présents sont souvent marqués par une perte plus ou moins importante de valeurs jugées essentielles, associée à une disparition ou un flou dans les repères traditionnels qui permettaient de tracer son chemin en harmonie avec soi-même et avec les autres. Le respect fait partie de ces valeurs, et il se présente comme une valeur immuable de l'univers des Arts Martiaux.

Inné ou acquis ?

Comme pour d'autres aspects de l'individu, on pourrait se demander si on nait naturellement "respectueux", comme on naîtrait intelligent, honnête ou sincère. En fait, sans entrer dans de complexes théories sur l'individu, la notion de respect est une de celles qui doivent impérativement s'acquérir, tout comme le fait de savoir lire et écrire. En ce sens, c'est l'environnement, et lui seul, qui va bâtir l'individu ou plutôt, influer sur sa façon de se construire lui-même.

Si on prend l'exemple de "l'enfant-loup", c'est-à-dire d'un être qui serait totalement isolé de l'espèce humaine et qui serait livré à lui-même pour assurer seul sa survie, les notions de bien, de mal, et aussi de respect, n'auraient aucun sens, seul l'instinct "reptilien" de survie existerait.

Commencer par le début

Cet euphémisme apparent n'en est en fait pas un, si on prend la chronologie de l'existence. L'enfant en bas-âge réagit avant tout à ses besoins dits "primaires", mais perçoit les autres êtres, en l'occurrence ses parents, ou éducateurs, en tout cas ceux qui le nourrissent et dont il dépend. Et très vite s'installe une épreuve de force, dans laquelle il jauge l'effet de sa résistance, de ses cris, de ses exigences, visant la seule satisfaction de ses besoins et désirs.

C'est là déjà que doit intervenir l'apprentissage du respect, par la prise de conscience de l'existence et de la valeur des autres, qui conduit très vite à celle du juste équilibre dans l'échange.

Se forger une vie sociale

En continuant par l'école, le collège, etc., l'individu va être constamment exposé à des situations dans lesquelles il va devoir échanger et cohabiter avec d'autres. Par des expériences successives, parfois difficiles, il va découvrir que la reconnaissance de l'existence et de la "valeur" de l'autre, ainsi que de savoir autant donner que vouloir prendre ou recevoir, sont incontournables pour pouvoir progresser, à tous les sens du terme.

Ce sera vis-à-vis des parents, tuteurs, éducateurs, enseignants, bref, envers tout ce qui pourra représenter, non par l'ordre établi, mais l'incarnation des valeurs propres à la société humaine en général, quelle que soit la spécificité politique, religieuse, ethnique ou autre.

Une école de vie...

Le Dojo joue un rôle primordial dans l'acquisition de la notion de respect. Les rituels bien connus, en particulier le salut, que ce soit au Dojo lui-même, à l'enseignant, aux partenaires, matérialise le respect vers le lieu où on s'entraîne, les anciens qui vous transmettent ce qu'ils ont appris avant vous, enfin ceux sans qui vous ne pouvez progresser, ni même pratiquer dans les conditions souhaitées, à savoir les autres pratiquants.

Au delà du salut ou des gestes, l'état d'esprit doit être permanent. Il transparaîtra dans votre attitude, et permettra d'établir cette forme de communion dans l'échange, qui crée l'atmosphère propice à une pratique de qualité et bénéfique. Checher, non pas à dominer ou éblouir ses partenaires, mais rester humble et simple tout en donnant sincèrement le meilleur de soi-même sans compromission, est le meilleur moyen de progresser ensemble, et est la marque des pratiquants se situant "au-dessus du lot".

Ne rien lâcher

Entrer dans un entraînement, c'est un choix librement consenti par celui qui le fait, et ce doit être de décider dès le départ de se mettre au diapason de celui-ci. Toute attitude désinvolte, décontractée, marquée du moindre effort, est non seulement un manque de respect, mais un affront envers tous ceux qui cherchent à se dépasser, qui s'engagent résolument dans un face-à-face sans restrictions avec eux-mêmes.

Ceci ne veut pas dire qu'il faille rechercher systématiquement la souffrance et l'absence de plaisir. Mais ce dernier viendra de lui-même sur d'autres bases. Tous les assauts conventionnels, et en général, tout le travail à deux, doivent être particulièrement empreints de respect mutuel et de respect vis-à-vis de l'exercice pratiqué en commun. C'est dans la réciprocité que se trouve le secret de la progression. Comme le disent parfois certains experts, il faut savoir se mettre "au rythme" de l'autre, et ne pas réagir que par rapport à soi-même. Certains exercices, comme le "Iaï" ou le "Kumite de loin" traditionnels, sont typiques de cette notion. Si on ne se "fond" pas dans le partenaire, on n'a aucune chance de réagir correctement à une attaque, avec le bon timing.

Le grand gagnant

Si on entretient en permanence cette forme de respect envers autrui, on s'apercevra vite qu'en fait, tout commence et finit par le respect envers soi-même. Se respecter, c'est aussi maintenir une hygiène de vie physique et morale, avoir cette sensation très particulière en se regardant bien en face que "rien ne manque", et de se dire, comme dans "le Seigneur des Anneaux" de J. Tolkien, que l'important est seulement de "bien utiliser le temps qui vous est imparti".

Designed and implemented for GENEVE SHOTOKAN KARATE • Powered by Andre Reidel • All rights reserved • 2021